Imaginez que vous puissiez plonger au fond des océans pour explorer le monde sous-marin, vous installer aux manettes d’une fusée en partance pour de lointaines planètes, deviser avec des personnages historiques, prendre les mesures qui sauveront la Terre d’une catastrophe nucléaire… le tout entre les quatre murs d’une bonne vieille salle de classe.

Réalités virtuelle (RV) et augmentée (RA) rendent désormais cela possible. Ces nouvelles technologies transportent les utilisateurs au sein d’environnements en trois dimensions simulés par ordinateur, les plaçant dans des situations normalement inaccessibles aux êtres humains – ou trop dangereuses. Voilà que vous pouvez voyager dans des pays lointains, arpenter des univers fantastiques ou même remonter le temps ! Mais ces outils ont également des applications plus spécifiquement pédagogiques : ils permettent par exemple aux étudiants en médecine de s’exercer à opérer ou à ceux des filières industrielles d’apprendre à souder, ou encore fournissent un public numérique à qui doit répéter un important discours.

Dans certains domaines, la RV et la RA peuvent améliorer l’apprentissage et l’implication des élèves. Des études montrent que certains programmes d’entraînement en réalité virtuelle, à l’instar des expériences d’apprentissage immersif, sont globalement plus dynamiques et plus efficaces que les méthodes d’enseignement alternatives ou traditionnelles. Ces technologies, en se répandant, vont faire apparaître de nouvelles typologies d’espaces.

Andrew KimChercheur Workspace Futures, Steelcase

Andrew Kim, chercheur Workspace Futures, et son collègue Paul Noll s’intéressent depuis des années aux applications de la réalité virtuelle dans le champ de l’éducation. Ils en perçoivent bien les exceptionnelles opportunités pratiques : « La grande différence, c’est que l’apprentissage immersif sollicite plus les sens, commente Paul Noll. On attend de l’utilisateur qu’il s’implique davantage – et même complètement – dans l’expérience. »

Qu’est-ce que l’apprentissage immersif ?

L’apprentissage immersif consiste tout simplement à intégrer la réalité virtuelle et la réalité augmentée dans le processus pédagogique. La première simule un environnement en trois dimensions dans un appareil, tandis que la seconde superpose au monde réel du contenu généré par ordinateur. Les deux peuvent répliquer un environnement d’apprentissage existant. Le domaine de l’éducation a été l’un des premiers à adopter les technologies de réalité virtuelle, note Paul Noll, et c’est là que l’on en retrouve les usages les plus concrets. « Nous constatons que dans ce champ, l’expérience immersive comble un besoin. Enseignants et apprenants en tirent de vrais bénéfices. »

Les avantages de l’apprentissage immersif sont nombreux et dépassent largement la seule expérience multisensorielle. C’est une manière de « gamifier » le processus d’apprentissage. Grâce à des formes de gratification, à la compétition et aux interactions sociales, il motive les élèves et les encourage à s’impliquer pleinement dans leur cursus. Il leur ouvre également d’autres perspectives sur certains systèmes et concepts, améliorant leur compréhension à mesure que leurs connaissances s’accroissent. Ces technologies, en présentant les informations selon différentes manières et en facilitant la communication à l’aide d’outils immersifs, s’adressent à une grande diversité d’apprenants. Les étudiants explorent diverses carrières et se lancent dans des simulations en conditions réelles, amassant par la répétition une expérience très précieuse dans un environnement sécurisé et contrôlé. « Certains concepts sont difficiles à saisir en deux dimensions, remarque Andrew Kim. Prenez par exemple le domaine du soin, de la chimie ou toute autre spécialité nécessitant de mettre les mains dans le cambouis : vous comprendrez mieux avec une expérience virtuelle en trois dimensions. »

Créer des espaces d’apprentissage immersif efficaces

Le problème, c’est que les salles de classe et espaces d’apprentissage traditionnels ne sont pas toujours adaptés à des approches aussi sophistiquées. L’apprentissage immersif est une forme d’apprentissage extrêmement socialisante, mais qui peut isoler si elle n’est pas menée correctement, car les utilisateurs seront trop enfermés dans le monde virtuel qu’ils ont sous les yeux. Il faut donc repenser les environnements d’apprentissage à l’aune de ces expériences immersives. Les chercheurs et designers de Steelcase ont identifié quatre aspects à prendre en compte pour améliorer la compatibilité de ces espaces avec l’apprentissage immersif et les technologies associées.

Sécurité

Le mouvement est aujourd’hui le maître-mot. Qu’elles impliquent des êtres humains ou des contenus, les interactions sur écran 2D ont fait leur temps. Le monde virtuel – dans lequel on peut marcher, tourner, sauter et bouger ses bras – peut apporter un début de solution, mais la question du mouvement pose d’autres problèmes. Les environnements doivent être suffisamment ouverts pour se déplacer, et pourvus de délimitations et d’un mobilier moelleux et modulable pour réduire le risque de blessures. La texture des sols permet à la personne de se repérer dans l’espace tout en prévenant chutes et glissades. Les casques de réalité virtuelle sont si captivants qu’ils peuvent causer chez les utilisateurs une sorte de mal de mer, car l’environnement bouge alors qu’eux restent sur place. Pour contrer cela, on peut là encore miser sur le sol qui servira de point de repère pour l’usager, et disposer des ventilateurs dans la pièce pour simuler le mouvement.

Collaboration

La réalité virtuelle peut être un formidable catalyseur de collaboration quand elle est bien utilisée, mais une expérience extrêmement solitaire dans le cas contraire. L’un des éléments clés pour un apprentissage immersif de meilleure qualité consiste à installer un écran permettant à tous les étudiants et enseignants de suivre l’expérience en groupe. Les apprenants peuvent ainsi s’impliquer et interagir avec le contenu en simultané, ce qui favorise la collaboration et le sentiment d’appartenance. Il est également judicieux de créer un périmètre ou un espace de visionnage hors champ pour les élèves qui pourraient ne pas être directement concernés par l’écran partagé. Ils pourront observer et apprendre de loin tout en se sentant inclus. Par ailleurs, il peut être intéressant pour l’enseignant de voir la même chose que l’apprenant, afin de pouvoir le guider ou lui donner des instructions si nécessaire. Il pourra ainsi formuler des remarques en temps réel, prendre en compte les besoins individuels et proposer à tous les participants un suivi plus personnalisé et efficace.

Flexibilité

L’aménagement de zones de réalité virtuelle et de grands écrans de projection dans les espaces de cours est indispensable pour favoriser les différents types d’apprentissage. Une bonne salle de RV doit être aussi versatile que possible. Elle doit être équipée de tables et chaises modulables et emboîtables, compatibles avec un large éventail d’activités d’apprentissage (discussions de groupe, exercices pratiques, exposés, recherches individuelles…). Par ailleurs, étant donnée la rapidité des avancées technologiques, il est important de créer des espaces adaptables, à même d’accueillir de futures innovations. Cette flexibilité, en garantissant l’intégration de nouveaux outils et technologies au fur et à mesure de leur apparition, permettra de garder un environnement d’apprentissage à la page.

Rangements

Les outils et technologies de réalité virtuelle sont fragiles et onéreux. Mieux vaut donc prévoir d’emblée des espaces de rangement adaptés et sécurisés. Ces derniers doivent pouvoir être verrouillés pour limiter leur accès. Les équipements doivent aussi pouvoir charger entre deux utilisations : optez pour des rangements pouvant loger les appareils et leurs accessoires de charge. Enfin, les rangements mobiles ne sont pas à négliger : ce sont eux qui permettront le partage d’équipements entre les salles de classe tout en garantissant une sécurité optimale.